Le Gastinel  

Parmi les  nombreux habitants de St Antonin vivait lo Gastinel. Il était né de père inconnu. Sa mère Melle Thirondel l’avait prénommé Gaston. Il grandissait dans une humble maisonnette choyé par sa famille.
« Tu es le petit gars de Dieu » lui racontait sa mère. Est-ce pour cela qu’il ne savait pas dire son nom correctement ? Gaston Thirondel était transformé en Gastinel. Devenu orphelin à l’âge de 7 ans, il perdit son bonheur. Depuis il errait de maison en maison. Il survivait en mangeant des restes jetés et faisait de même pour se vêtir. Il ne lui restait que son surnom. Il aurait bien aimé être sédentaire mais Gastinel était laid, malodorant, et souffrait de solitude.

Un beau jour, il décida d’aller vers Caussade chercher l’âme sœur. En chemin il rencontra un corbeau qui se moqua de lui :
«  Que tu es laid !!!
    - Oh, que tu es méchant ! » et le corbeau s’envola.
Quelques kilomètres plus loin ce fut un furet qui lui parla :
«  Que tu sens mauvais !!!
    - Oui, je le sais, et le furet disparut lui aussi. »
A l’endroit le plus escarpé de son périple, il croisa étrangement un vieux sanglier :
«  Ah ! Ah ! Ah ! tu es tout seul.
    - Oui, je le sais, tout comme toi singulier sanglier. »
Cela se voyait-il tellement et pourquoi les animaux parlaient-ils ici ? Gastinel était triste.

Deux cents mètres plus loin après ces trois rencontres, il vit une vieille femme assise sur une grosse pierre. Elle l’interpella d’une voix chevrotante :
«  Aide moi petit, je n’arrive plus à me mettre debout ! Je dois rentrer chez moi, aide moi je t’en supplie. »
Il était seul, malodorant et laid, mais il avait bon cœur. Il l’aida comme elle le lui avait demandé, alors elle devint de plus en plus belle, de plus en plus jeune.
«  As-tu vu trois animaux ? » lui dit-elle.
Il hocha la tête.
    « Cite les !
    - Le co cor corbeau.
    - Un corbeau, mais que c’est laid !
    - Ah bon, je n’ai vu que son beau plumage brillant qui le rendait majestueux, Madame. »
Aussitôt lo Gastinel se métamorphosa en un magnifique jeune homme, tout de noir vêtu.
   « Continue.
   - Le ffff ffff fuuuret !
   - Un furet qui sent mauvais, c’est sûr.
   - Je ne sais pas , Madame, mais ses yeux étaient sombres et luisants, cela lui donnait un air intelligent. »
Sa mauvaise odeur disparut et ses yeux devinrent comme ceux du furet.
    « Continue encore.
    - Le sss sssaaan sanglier !
    - Un sanglier solitaire bien sûr.
    - C’est possible, Madame, mais ce qui m’a le plus marqué c’est la puissance qui se dégageait de sa masse. »
La force enfin, la puissance, envahirent son corps !
Et il se trouvait ainsi devant elle. A l’emplacement de la grosse pierre surgit une magnifique demeure. Ils y entrèrent.
«  Où sommes-nous ? demanda-t-il
   - Je ne le sais pas encore. Donne moi ton nom et je te le dirai.
   - Gastinel, Madame !
   - Alors, nous sommes à Gastinel. Cela n’existait pas encore, tu y restera la vie durant. »
Á cette époque c’est ainsi que leurs noms étaient donnés aux lieux dits, comme par enchantement, par des enchanteresses.