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Il était une fois, un pauvre paysan des Causses du Quercy qui se plaignait fort du manque d'eau sur ses terres pierreuses.
Un soir alors qu'il rentrait des champs marchant pesamment à
côté de son maigre mulet tout chargé de cruchons
vides, il vit à la croisée des chemins du Pech de
Fourques : une vieille femme au menton long et au nez crochu, assise
prêt de trois puits.
Elle l'interpella ainsi : "Approche, mon brave homme "
- "Que me veux-tu ?" répondit-il méfiant.
- "Je veux te rendre riche de toute l'eau que ton mulet pourra porter."
- "Mais comment peux-tu faire ça la vieille ?"
- "Approche mon garçon, je vais t'éclairer sur la chose. Tu vois ces trois puits ?"
- "Bien sûr, grand-mère, que je les vois ! Mais tout le monde sait qu'ils sont taris depuis bien longtemps."
- "Ne m'interromps plus, et écoute-moi bien, mon fils ! Je vais
t'attacher une corde autour de la taille et tu te laisseras glisser
jusqu'au fond du premier puits. Là, repose un gros crapaud. Tu
le déplaceras sur mon tablier que je vais te confier. Sous le
crapaud est cachée une cruche pleine d'une eau pure. Il ne te
restera plus qu'à charger la cruche sur ton dos,
récupérer mon tablier et me demander de te hisser hors du
puits. Tu feras de même dans le deuxième puits. Là,
repose un énorme crapaud. Tu agiras tout comme pour le premier.
Sous lui, tu trouveras une outre d'une eau claire que tu prendras sur
ton dos, récupère mon tablier et appelle-moi. Je te
hisserai hors du puits. Au fond du troisième, repose un crapaud
géant. Fais comme pour les deux autres, sous lui tu trouveras un
tonnelet plein d'une eau fraîche. Prends le sur ton dos,
récupère mon tablier, appelle-moi, mais avant de remonter
n'oublie surtout pas de récupérer un vieux seau de bois
que j'ai laissé tomber là."
Le brave paysan accepta et se laissa encorder. Il se glissa dans le
premier puits, où en effet il vit en son fond un crapaud de la
taille d'un chien. Il le fit glisser sans peine sur le tablier de la
vieille, trouva la cruche pleine d'eau pure qu'il chargea sur son dos.
Il reprit le tablier et remonta le tout, aidé de la vieille
femme.
Dans le second puits, il découvrit un crapaud grand comme un
homme qui se laissa déplacer sur le tablier. Il vit alors
l'outre d'eau claire qu'il jucha sur ses épaules avant de
reprendre le tablier et de remonter hissé par la vieille femme.
Au fond du troisième puits, il se trouva face à un
crapaud immense de la taille d'un cheval. Sans aucun problème il
le déposa sur le tablier, dégagea le tonnelet d'eau
fraîche qu'il cala sur son dos. Il aperçut alors au pied
de la paroi un vieux seau de bois. Il le prit ainsi que le tablier, et
remonta.
Arrivé en haut, la sorcière, lui ordonna: " Donne-moi :
le seau, le tablier et l'eau. Rien n'est pour toi, tout est à
moi !" Fou de colère, le bonhomme saisit la sorcière, la
roula dans son tablier et la précipita dans le puits où
le crapaud la goba.
Il rentra chez lui, son mulet chargé de la cruche, de l'outre,
du tonnelet et du seau. Le soir même ; sa famille fit bon usage
de toute l'eau. Le lendemain il n'en restait plus une goutte.
Il prit alors le seau en bois de la sorcière et partit à
la corvée d'eau au puits de Fonmalnette. C'était le point
d'eau le plus proche de sa ferme, mais son eau était vaseuse et
malodorante. Malgré cet aspect peu ragoûtant il remplit
son seau et le rapporta à la ferme. Et là, il fut tout
surpris de voir que l'eau dans le seau était devenue pure,
claire et fraîche. Il venait de découvrir le secret du
seau magique de la sorcière qui transformait et purifiait tout
ce qu'il contenait.
Après cette aventure, plus personne sur le Pech ne manqua d'une
eau pure, claire et fraîche. Lui-même devint puisatier,
mais ça c'est une autre histoire.
Et cric et crac moun counto es acabat…
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